Portrait de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais
Le 13 janvier 1791, sous la Révolution, une loi paraît qui décrète la liberté des théâtres : tout un chacun peut désormais ouvrir en France une salle de spectacles et y donner les pièces de son choix – chose impensable sous la Monarchie.
Dans le Marais, la nouvelle est accueillie avec enthousiasme par quelques « gens de théâtre » éclairés, parmi lesquels figure Beaumarchais, l’illustre auteur du Barbier de Séville. Beaumarchais est une « célébrité » dans le quartier : il y habite depuis longtemps et a même, peu de temps avant la Révolution, fait bâtir son extraordinaire demeure, hélas disparue, le long du boulevard qui porte à présent son nom.
Les six acteurs-auteurs, avec à leur tête Langlois de Courcelles, un « transfuge » de la Comédie-Italienne, portent leur dévolu sur un terrain situé rue de Sévigné (à hauteur du n° 11). Ils acquièrent une partie de l’ancienne propriété de la famille Poulletier, confisquée à la Révolution et, sur l’emplacement, demandent à l’architecte Guillaume Trepsat, élève de Blondel, de bâtir un théâtre pouvant accueillir jusqu’à 1500 spectateurs.
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Façade du théâtre Beaumarchais, ©Archives Nationales
Le chantier est lancé, financé par Beaumarchais, principal commanditaire. La construction est rapide : quelques mois après la promulgation de la loi, l’édifice est achevé – pour l’anecdote, on aurait réemployé ici des pierres de la Bastille.
Le bâtiment édifié par Trepsat obéit aux modes du temps : à l’intérieur, une grande salle à l’italienne, avec parterre, baignoires et balcons, accueille le public ; à l’extérieur, une façade blanche d’inspiration classique, avec pilastres et colonnes antiques, signale de loin l’édifice. Trepsat sait cependant se montrer original : il donne ainsi à ses fenêtres et à leurs garde-corps une forme ogivale, dite « à la cathédrale », empruntée au Moyen Âge.
Le jour de l’inauguration, le 31 août, c’est la Métromanie de Piron qui « ouvre le bal ». Par la suite, Beaumarchais y donne régulièrement plusieurs de ses œuvres. Il y crée également La Mère Coupable en août 1792.
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Tant bien que mal, le « Théâtre du Marais » traverse la Révolution. C’est l’Empire qui provoque sa chute. En 1807, Napoléon rétablit l’ordre ancien : sauf huit salles de spectacles « officielles », tous les théâtres parisiens sont fermés. Le 11 rue de Sévigné devient alors une annexe de la Société des Pompes funèbres, qui occupe déjà le bâtiment adjacent (l’actuelle caserne des sapeurs-pompiers), puis un établissement de bains, cité d’ailleurs par Hugo dans Les Misérables. La salle à l’italienne est entretemps détruite ; seule la façade reste en place, très remaniée cependant, telle qu’on peut la voir encore aujourd’hui.
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