Dans la continuité de la rue des Quatre Fils, après le croisement avec la rue Vielle du Temple, se profile la rue de la Perle.

Après avoir pris un café au bistro du coin, servi par Eric, Didier, Magid ou Maximus, enfilons donc cette rue de la Perle dont le nom provient, selon certains, d’un jeu de Paume ou d’un établissement nommé « A la Perle des Tripots », qui s’y trouvaient. A chacun de choisir sa version selon son inclination profonde.

Au 9 se trouve la première école professionnelle pour jeunes filles, fondée en 1862 par Élisa Lemonnier, considérée comme la fondatrice de l’enseignement professionnel pour les femmes en France.

Au 3  : hôtel réalisé par Libéral Bruand, qui fut entre autres l’architecte du château de Richmond, en Angleterre, pour le duc d’York, de l’Hôpital de la Salpêtrière, de l’hôtel des Invalides, de la basilique Notre-Dame-des-Victoires…

… et de l’hôtel voisin, au N°1, qui porte le nom d’Hôtel Libéral Bruant donc, que nous orthographions avec un t final pour changer, car les deux formes sont possibles. Autrefois musée de la serrure, c’est actuellement un centre d’art contemporain.

Nous arrivons déjà à la fin de cette courte rue. Probablement du fait de la proximité du musée Picasso, les murs se couvrent soudain d’œuvres de Street artists, dont une de Shatters, qui utilise des morceaux de miroir ou de verre coloré pour ses créations et, surveillé par une chimère anonyme, un cadre de vélo incrusté dans une encoignure, œuvre de Ride In Peace, qui en a déjà accroché une soixantaine dans tout Paris.

S’ouvre alors la place de Thorigny (Jean-Baptiste Claude Lambert), qui fut prévôt des marchands de Paris de 1726 à 1729. Charles Perrault y habita à partir de 1685.

D’autres artistes de rue ont semé leurs créations sur ces murs. On remarque une Joconde de GZUP, encore un Cœur Anarchiste, une des affiches de John Hamon, un Pablo Picasso par Invader, un Sonic de GZUP également, un Diamantaire… c’est vraiment l’antichambre des musées !

Sur la droite, tournons dans une rue qui porta différents noms au cours de l’histoire, dont celui de « rue de Diane » car Diane de Poitiers a habité l’hôtel Barbette, dont les jardins s’étendaient jusqu’à elle, nommée aujourd’hui rue Elzévir.

Ce joli nom d’origine hollandaise est celui d’une famille de typographes et imprimeurs néerlandais ayant exercé leur métier durant tout le XVIIème siècle à Leyde et à Amsterdam. Ils ont inventé le caractère typographique qui porte leur nom.

Ce même nom fut donné en 1921 par Francis Thibaudeau à l’une des quatre grandes familles de polices de caractères qu’il a identifiées dans sa classification : les didots, les égyptiennes, las antiques et le elzévier, donc, dont les Garamond, les Palatino et les Times font entre autres partie.

Les elzévirs ont pour principale caractéristique de présenter des empattements (petites extensions qui terminent les extrémités des caractères) triangulaires. Les polices utilisées pour les enseignes des deux boutiques chics, classiques et un peu austères qui ouvrent la rue appartiennent sans doute à cette famille.

Restons dans l’écriture, dans le sens large du terme : Louis Ferdinand Céline, dans «Mort à crédit», situe dans la rue Elzévir, sans précision de numéro, l’atelier et la boutique du ciseleur Gorloge chez lequel Ferdinand Bardamu, personnage principal de son roman, (ainsi d’ailleurs que du «Voyage au bout de la nuit» et de ses suites) travaille. Les romans de Céline étant largement autobiographiques, on peut penser que l’auteur lui-même y vécut ce que vécut son personnage.

Sans transition, passons à une consœur en écriture du sulfureux Céline : Madame de Sévigné. Elle habita semble t’il au n° 14, de 1672 à 1677. Nous vous en dirons plus sur cette célèbre épistolaire lorsque nous visiterons la rue qui porte son nom, où se trouve l’hôtel Carnavalet, devenu le musée historique de la ville de Paris, où elle vécut de 1677 jusqu’à sa mort, en 1696.

Au niveau du 10, l’arrière et le jardin du Centre culturel suédois se trouvant rue Payenne, dont nous parlerons plus tard également.

Sur la gauche s’ouvre la rue Barbette. Nous reviendrons faire un tour dans cette rue dès que nous en aurons fini avec la rue Elzévir.

Au no 8, l’hôtel de Donon abrite le musée Cognacq-Jay depuis 1990. La rame de Starck parlera de ce bâtiment cent fois mieux que nous. Apportons toutefois un supplément d’info à propos du couple qui réunit les collections que ce musée abrite dorénavant.

Ernest Cognacq (1839-1928) perd son père à douze ans et part tenter sa chance à Paris à l’âge de quinze. Il est employé dans divers magasins, dont «Aux Quatre Fils Aymon» – que nous ne nous attendions pas à retrouver ici – et «Au Louvre», d’où il est rapidement congédié pour insuffisance.

Beaucoup auraient baissé les bras en maugréant après une telle déconfiture mais pas Ernest qui, avec sa femme Marie-Louise Jaÿ (1838-1925), finit, après moult mésaventures que nous vous épargnerons ici, par créer le célèbre magasin de la Samaritaine.

Nous voici arrivés à la fin de la rue Elzévir. Au bout, la rue des Francs-Bourgeois.

Retournons nous pour prendre, comme promis, la rue Barbette. Au passage, saluons le courage de cette jeune femme ainsi que sa créativité en matière de détournement du mobilier urbain.

Rue Barbette, donc. Etienne Barbette (vers 1250-1321), issu d’une famille de riches marchands, fut, entre autres, prévôt des marchands de Paris. Aux alentours de 1300, il construisit une «maison de campagne» sur une immense propriété située en dehors de l’enceinte de Philippe Auguste, qu’il possédait.

Elle deviendra l’hôtel Barbette qui, agrandi et embelli, servit plus tard de résidence à la reine Isabeau de Bavière (1385-1422) ou au siècle suivant à Diane de Poitiers (1553-1566), favorite du roi Henri II.

Le bâtiment disparut progressivement au cours du XVIème siècle pour laisser place à la rue Barbette créée en 1563.

Au 3, malgré nos efforts de discrétion, deux jeunes femmes ont reconnu la Google Car, qui se reflète d’ailleurs dans une porte vitrée.

Au 5, hôtel ayant appartenu à la famille de magistrats Thumery de Boissise de 1700 à 1748, puis à la famille Souchet de Bisseaux jusqu’à la Révolution.

Au n°7 de cette rue, ce parking fut autrefois un hôtel, une gendarmerie, puis de 1887 à 1930, un atelier où le pâtissier Evrard conçût, fabriqua et commercialisa les confiseries Pierrot Gourmand. Rien sur ce bâtiment ne rappelle ce fait de la plus haute importance pour quiconque a été enfant. Exigeons qu’on y installe une rame de Stark, légèrement retravaillée dans sa forme afin qu’elle évoque une gigantesque sucette.

Au No 9 se trouve l’hôtel de la famille de Pommereuil qui fut acquis par Michel-Étienne Turgot, prévôt des marchands de Paris. Décidément, nous croisons souvent des personnalités qui ont rempli cette fonction : Caumartin, Thorigny, Barbette… ils étaient en quelque sorte les ancêtres du maire de Paris. Le plus célèbre d’entre eux, Etienne Marcel, fut prévôt de 1354 à 1358.

Son rôle dans la révolte des bourgeois de Paris qui tentèrent de limiter les prérogatives royales du dauphin Charles en matière fiscale entraîna, outre sa mort, le déclin de cette fonction jusqu’en 1789, où elle disparût. En 1975 fut recréé le poste de « maire de Paris » dont le premier fut Jacques Chirac de 1977 à 1995.

Mais revenons à Turgot. Le nom de ce personnage reste essentiellement attaché au plan de Paris en perspective cavalière dit plan de Turgot dont il commanda le dessin à Louis Bretez. Ce plan réalisé à l’échelle 1/400 environ mesure 2,49 m sur 3,18 m.

Il couvre approximativement les actuels onze premiers arrondissements de Paris et le Marais y trouve naturellement sa place centrale. D’alembert l’encyclopédiste, Turgot le cartographe, glorieux ancêtres de Wikipedia et de Google Maps, le Marais peut s’enorgueillir de vous avoir abrités dans ses murs !

Le N° 11 est un hôtel de 1635 où résidèrent successivement le fils du premier président du parlement de Paris, des magistrats, un lieutenant général. La porte et le départ de l’escalier du XVIIe sont classés. Il est aujourd’hui l’une des deux annexes du collège Victor-Hugo.

Le 15 est un hôtel cossu construit en 1769 par Jean-Baptiste Lemarié d’Aubigny. On peut lire aujourd’hui sur le fronton qui surplombe le superbe portail surmonté de deux médaillons :  «DELARUE CLOUTERIE», ce qui prouve qu’on peut faire fortune non pas en ne faisant rien, mais en faisant des clous.

Fin de la rue Barbette, qui débouche sur la rue Vieille-du-Temple.

 Texte : Djiefssi

30.06.20

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